L’amour que se portent Primo et Esmeralda, qui vivent tous deux dans un endroit de la forêt amazonienne, ne s’accommode pas de la modernité. Le rapport qui les unit l’un à l’autre célèbre le temps, la lenteur, le respect, la confiance dans le verbe poétique – seuls capables de rendre compte de la beauté de leur vie. Quand une émotion les étreint, chacun octroie à l’autre un prénom supplémentaire. Au début de l’histoire, Primo en compte déjà huit, Esmeralda six.
Alors que Primo est sommé par un homme pressé de traverser la grande route Ayrton Senna pour aller exploiter du caoutchouc dans la forêt – maigre espoir pour lui de sortir de sa misère –, Esmeralda est prise d’un pressentiment et évoque avec lui l’emplacement de leurs tombes dans l’enclos qui entoure leur maison. La confrontation de Primo avec le monde du travail – proche de l’esclavage a vite raison de lui. Demeurée seule, Esmeralda reçoit la visite de leur fils Thiago, parti depuis longtemps «faire des études»: il partagera avec elle un secret aussi lourd dans ses conséquences qu’il a été lumineux dans son avènement.
«Formula 1» est un texte inédit de Lina Prosa. Jamais mis en scène et non publié. Cette écriture pudique et humble porte en elle un grand sens du tragique. La violence y est sans cesse présente, contenue, prête à éclater. Le propos de Lina Prosa est toujours ouvert, il n’est jamais militant, mais constat lucide sur un monde qui se délite et pour lequel elle formule constamment un espoir, celui d’une réconciliation et d’une compréhension entre humains, toutes originesconfondues.
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